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The sound chaser
23 août 2005

Pink Floyd : Animals (1977)

usineanimalsorwell

Pink Floyd : Animals - EMI (1977)

"you've got to strike when the moment is right without thinking...".

Après l' hommage entier de "wish you were here" deux ans auparavant au génie et premier leader, Syd Barrett, les choses se sont obscurcies sur la planète Pink Floyd, comme partout dans le royaume de la perfide Albion. Thatcher a pris le gouvernement d'une main de fer et les temps deviennent plus durs. Pink Floyd, dans l' air du temps et malgré son statut de dinosaure qui le fera entrer dans le collimateur des punks peu de temps après, l'a bien compris. D' ailleurs c'est là tout le génie du groupe (car le groupe en a encore à cette époque), devancer d'un an le mouvement anarchiste musical avec ce concept album tournant autour du thème de "la ferme des animaux" la satire noire d' Orwell.

Dans le livre et sans spoilier trop, c'est le cochon qui de par son intelligence s' élève le plus parmi les autres bêtes de la ferme et de ce fait devient le plus dangereux et rapidement manipulateur. Bien avant d' autres écrivain, Orwell savait que le pouvoir  (attention hein, ce n'est qu'un avis subjectif qui ne se base pas forcément pour notre pays ou monde actuel) n' apporte au fond que manipulations, corruptions et mensonges. Le cochon se substitue à l' homme pour régner sur le micro univers qu'est la ferme.

Comment dès lors ne pas s' étonner et comprendre l'image du cochon volant survolant une usine d' abattoirs ? C'est l' animal qui échappe à son statut et échappe donc à l' homme. Pourtant l' album du groupe n' en démontre pas moins que l' animal est un homme comme les autres. Reprenant la satire d' Orwell, Waters qui s'est emparé de presque tout le projet (Gilmour réussira néanmoins à cosigner "dogs") en profite pour démontrer un portrait noir et cynique de l' humanité à travers 3 animaux : les chiens (les milices, sans cervelles, juste des outils), les cochons (les politiciens, les savants, l' intelligentsia qui utilise ses dons à mauvais escient) et les moutons (la masse...).

La musique en plus des textes ironiques et vitriolés se voit donc elle aussi changée. Abandonnant la sophistication stéréo quadriphonique de "dark side...." et "wish...", le son devient plus étouffé, la batterie devenant un coeur qui bat à l' approche de la mort (Dogs, fabuleux de 17 minutes), le synthé ne se chargeant que de lignes atmosphériques (le souffle, la respiration), la basse rampant ou se cachant, la guitare qui alterne entre mise en avant (le solo final et énergique de Sheep, ultime source de renouveau, comme si l' espoir pouvait subsister de la masse) et mise en arrière comme baissée (pigs), samplée derrière la voix de Waters, plus destabilisant que le doux Gilmour.

Un grand album noir et sombre qui voit là l' avènement du contrôle total de Waters sur le groupe.

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R
GLOIRE ET MISERE A LA FERME<br /> <br /> Dans la ferme Marie-Gilberte s'affaire autour du pot-au-feu. Sa grand-mère dans la cuisine, sénile, gît dans un fauteuil crasseux, le regard fixé sur la marmite. <br /> <br /> Marie-Gilberte n'a pas vingt ans et rêve d'étoiles au fond de son trou. Seule la radio meuble le vide de son existence, peuplant de rêves simples son imaginaire borné par les travaux de la ferme. Justement, un chant émis par la radio, posée sur la table entre le saladier et la boite de sucres, allume soudain en elle des feux inconnus, éveille dans son coeur des sentiments magnifiques. C'est un petit chanteur à la voix céleste interprétant un chant sacré qui vient de semer chez Marie-Gilberte cette graine de paradis.<br /> <br /> Un ange en somme à travers le poste de radio vient d'entrer dans la vie misérable de la jeune fille, libérant son âme étouffée.<br /> <br /> Au son de la voix cristalline le pot-au-feu disparaît, la ferme n'existe plus, la grand-mère s'évanouit : Marie-Gilberte a le regard perdu dans des sommets intérieurs. Des sensations fulgurantes l'envahissent, des rêves flamboyants illuminent son visage. Le chant est de plus en plus beau, Marie-Gilberte est en pleine extase.<br /> <br /> La vieillarde impotente pendant ce temps est prise d'une quinte de toux, le regard toujours fixé sur la marmite où mijote le pot-au-feu, parfaitement insensible au chant séraphique qui est en train de bouleverser sa petite fille, de transformer la larve en libellule, de changer la patate en rose, ouvrant son intelligence à la vie, son coeur à la joie.<br /> <br /> Marie-Gilberte, toujours noyée dans ses nues, s'éloigne peu à peu des lourdeurs de ce monde, sourde à la pantomime catarrheuse de sa grand-mère. Cette dernière, pitoyable dans sa chaise qui exhale l'urine rance, à demi morte d'imbécillité avec son regard radoteur, en pleine décrépitude physique et mentale n'a qu'une pensée en tête : surveiller le pot-au-feu. Sa plus grande hantise pré-mortem : voir déborder le bouillon de la marmite.<br /> <br /> La jeune fille dans ses hauteurs éthéréennes entend de moins en moins les quintes de toux qui redoublent. Les éclats de voix de la vieille femme qui lui adresse des propos inintelligibles ne lui parviennent plus. <br /> <br /> Marie-Gilberte est exquisément déconnectée de la réalité. <br /> <br /> Le chant sublime à la radio se termine, des publicités criardes lui succédant aussitôt. Lorsque enfin Marie-Gilberte redescend de ses nuages dorés entre le bouillon du pot-au-feu qui déborde et le tic-tac horripilant de l'horloge en forme de cercueil, sa grand-mère est morte.<br /> <br /> Raphaël Zacharie de Izarra
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